Mouhamadou Moustapha Diagne : « La décision du préfet de Dakar déclarant le Maire Barthélémy Dias démissionnaire est- elle exécutoire ? »

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L’intervention vendredi dernier de la police à la mairie de Dakar pour mettre fin à la
conférence de presse du maire Barthélémy Diaz nouvellement déclaré démissionnaire par
le préfet de Dakar suscite beaucoup d’interrogations. Le maire et ses partisans parlent de
forfaiture. Qu’en est-il réellement ?
Il faut rappeler que la décision du préfet déclarant Barthélémy Diaz démissionnaire de son mandat
de conseiller municipal est un acte administratif unilatéral. Cet acte, notifié à l’intéressé le 11
décembre 2024, trouve sa base légale dans l’article 277 du code électoral qui dispose en son alinéa
1 que : « Tout conseiller municipal qui pour une cause quelconque se trouve dans l’un des
cas d’inéligibilité ou d’incompatibilité prévu par la loi, peut-être à toute époque, déclaré
démissionnaire par le représentant de l’Etat sauf recours devant la cour d’appel dans les
dix (10) jours de la notification ».
Ainsi formulé, certains pensent que la décision du préfet n’est pas exécutoire dans les 10 jours
prévus pour la saisine, par le maire de Dakar, de la cour d’appel. Que nenni.
C’est vrai qu’une première interprétation pourrait permettre de soutenir que l’expression « sauf
recours… » suspend la décision du préfet. Une suspension qui renvoie l’exécution de la décision
à l’expiration du délai de 10 jours pour saisine de la cour d’appel. En cas de saisine la décision ne
serait exécutoire que suite, à une décision de rejet du juge d’appel.
Une autre interprétation permettrait de soutenir que l’expression « sauf recours… » ne suspend
pas la décision du préfet en ce sens qu’elle signifie, tout simplement, qu’il n’est pas exclu que le
Maire de Dakar saisisse la cour d’appel.
Indépendamment de ces interprétations, il y’a lieu de rappeler un principe sacro-saint en droit
administratif. C’est le principe du privilège du préalable. Le privilège du préalable est un principe
de droit consacré par le Conseil d’État, donnant à l’administration un pouvoir exorbitant du droit
commun. L’accord préalable du juge n’est donc pas nécessaire pour qu’une décision administrative
soit respectée par ses administrés.
Par ailleurs, les actes administratifs sont revêtus de l’autorité de la chose décidée. La seule voie
légale pour suspendre l’exécution de la décision c’était d’introduire un référé suspension devant la
cour suprême. Le référé-suspension permet au juge d’ordonner la suspension provisoire (et non
l’annulation) de l’exécution d’une décision administrative lorsque l’urgence le justifie et qu’il existe
un doute sérieux quant à la légalité de la décision.
Suivant donc la logique de l’exécution immédiat des décisions administratives et du principe du
privilège du préalable, le préfet de Dakar est fondé à exécuter, dans l’immédiat, la décision déclarant
le Maire Barthélémy Diaz démissionnaire. Interdire à l’ex-Maire de Dakar l’accès à la mairie serait
certes une forfaiture, mais mettre fin à sa conférence de presse dans les locaux de la mairie n’en est
pas une.

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