Monsieur le Ministre,
Permettez-moi de m’adresser à vous en tant que citoyen engagé et soucieux du devenir démocratique de notre nation. La communication, dans toutes ses formes, constitue un pilier fondamental pour le développement, la cohésion sociale et la transparence dans une société moderne. Pourtant, les récentes évolutions dans notre pays, marquées par des restrictions de plus en plus visibles de la liberté d’expression et d’accès à l’information, interpellent la conscience nationale.
La Déclaration universelle des droits de l’homme, ratifiée par notre pays, garantit dans son article 19 le droit à « chercher, recevoir et répandre des informations et des idées par tous moyens ». La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, à son article 9, renforce ce principe. Ces textes internationaux, auxquels le Sénégal a adhéré, nous engagent à défendre la liberté d’expression comme un droit inaliénable.
Pourtant, nous assistons aujourd’hui à des dérives préoccupantes :
1. Restrictions sur l’accès à Internet et aux médias sociaux : Ces mesures, souvent prises sous prétexte de maintenir l’ordre public, portent atteinte à la transparence et à la participation citoyenne. Elles fragilisent le lien de confiance entre les citoyens et les institutions.
2. Pressions sur les médias : La multiplication des censures et intimidations visant les journalistes et les organes de presse réduit l’espace du débat public, pourtant essentiel pour une démocratie vivante.
3. Législations ambiguës : Certaines lois ou régulations, bien que justifiées comme des outils de lutte contre les discours haineux ou la désinformation, risquent d’être utilisées pour museler les voix dissidentes.
Monsieur le Ministre,
L’histoire nous enseigne que les restrictions excessives à la communication, comme celles observées sous des régimes autoritaires, non seulement étouffent la créativité et l’innovation, mais alimentent également la méfiance et l’instabilité.
En tant que dépositaire des politiques publiques en matière de communication, vous avez une responsabilité historique : celle de garantir un environnement où la pluralité des idées peut s’exprimer librement et où les médias, tant traditionnels que numériques, jouent leur rôle sans entraves.
Recommandations pour un cadre équilibré
1. Promouvoir l’autorégulation des médias : Encouragez la mise en place d’organismes indépendants, composés de journalistes, d’experts, et de représentants de la société civile, pour superviser le respect de l’éthique journalistique.
2. Renforcer l’éducation aux médias : Intégrez dans les programmes éducatifs des modules sur la pensée critique, la vérification des informations et l’usage responsable des médias sociaux.
3. Moderniser les infrastructures numériques : Plutôt que de restreindre l’accès à Internet, investissez dans son extension, notamment dans les zones rurales, pour réduire la fracture numérique.
4. Garantir la protection des journalistes : Mettez en place des mécanismes pour protéger les professionnels de la communication contre les intimidations et pressions, en veillant à leur sécurité.
5. Encourager la consultation citoyenne : Avant toute législation ou régulation concernant la communication, organisez des débats publics avec les parties prenantes pour assurer un consensus.
Monsieur le Ministre,
Le Sénégal, souvent cité comme un modèle démocratique en Afrique, doit se montrer à la hauteur de cette réputation. Une communication libre, équilibrée et responsable n’est pas un luxe, mais une condition sine qua non pour renforcer notre démocratie et favoriser un développement inclusif.
Je vous invite à considérer ces propositions comme des contributions constructives pour un dialogue ouvert entre votre ministère, les médias, et les citoyens. Ensemble, nous pouvons bâtir une nation où la communication est un levier de progrès et non un terrain de restriction.
Avec tout le respect dû à votre fonction, je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, en l’expression de mes salutations distinguées.
Alioune Ndiaye
Expert en développement international
Écrivain
Militant pour la transformation nationale