[Focus] Minée par une vague de démissions : L’Apr de Macky Sall, à un pas de l’implosion !

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L’ex-chef de l’Etat, Macky Sall, qui a enfilé ses habits d’Envoyé spécial des 4P (Pacte de Paris pour les peuples et la planète), a quitté le pays quelques heures seulement après avoir remis les clefs du palais à son successeur Bassirou Diomaye Faye. Il a laissé derrière lui son parti, l’Alliance pour la République (Apr), en lambeau, miné par une vague de départs.

Aliou Sall, Cheikh Oumar Anne, Doudou Ka, entre autres grosses pontes ont récemment annoncé leur départ de l’Alliance pour la République (Apr) de l’ancien président Macky Sall. Même s’ils n’ont pas encore officiellement annoncé leur destination, ces désormais ex- « Apristes » ont la particularité d’être tous proches de l’ancien Premier ministre, Amadou Ba, arrivé deuxième au dernier scrutin présidentiel de mars 2024. Ce dernier, devenu de facto le chef de l’opposition avec 35,79 % des voix, (soit plus de 1 million 600 mille électeurs), serait également sur le point de se retirer définitivement de la prairie marron-beige. « Amadou [Ba] a déjà quitté l’Apr, il n’est plus impliqué dans les activités du parti et lui est en train de manœuvrer pour asseoir une base politique solide. Il va officialiser ses intentions le moment venu », souffle un des proches de l’ancien ministre des Finances.

Une situation qui atteste que la dualité au sommet de l’Apr est devenue une réalité et qu’elle augure une scission. Et c’est d’ailleurs pour parer à toutes ces éventualités que Macky Sall avait, dès son départ du pays, précisé qu’il restait le président de l’Apr, parti qu’il a porté sur les fonts baptismaux, en 2008. Il a aussi rappelé aux membres de l’Apr l’importance de rester unis et tournés vers l’avenir, malgré « les vicissitudes de la démocratie », soulignant également la nécessité d’être « vigilants et engagés lorsque les intérêts nationaux et le bien-être des citoyens sont en jeu ».

De son côté, Amadou Ba a tenu à rappeler, en guise de réplique, que « plus d’un électeur sur trois a plébiscité » son « projet de paix pour une prospérité partagée », non sans annoncer son ambition d’élargir ledit projet à toutes les forces politiques et sociales qui partagent ses idéaux. « Ensemble, nous le ferons dans notre nouvelle posture d’opposition démocratique et républicaine, respectueuse des institutions, pour préparer les conquêtes prochaines, sur la voie du Sénégal réconcilié, prospère et juste qui demeure l’horizon de mon engagement », a alors souligné l’ancien chef du gouvernement, qui dit enfin rester « résolument engagé et prêt à « mener et à gagner les batailles du futur ».

Abdou Mbow, seul maître à bord

Mais, un fait est constant : depuis la chute du défunt régime, le député Abdou Mbow est seul à bord. Du fait de son statut de président du groupe parlementaire Benno bokk yaakaar (Bby) et de porte-parole adjoint de l’Apr, il est pratiquement le seul à porter la réplique sur des questions d’actualité. Sur la Déclaration de politique générale (Dpg) du Premier ministre Ousmane Sonko, par exemple, il est monté au créneau, annonçant une proposition de loi en vue de barrer la route au chef de l’Etat Bassirou Diomaye Faye, qui envisagerait de dissoudre la XIVe Législature dès le mois de septembre. M. Mbow a également « affronté » le chef du gouvernement et leader de Pastef qui avait menacé de contourner l’Assemblée nationale pour faire une déclaration de politique générale devant le peuple.

« Ousmane Sonko évite la confrontation intellectuelle », lui rétorquait-il sèchement. « Les députés de Yewwi ont assisté à la Dpg de l’ex-Pm Amadou Ba sans aucune réserve, celui-ci avait même été invité par lettre à procéder à sa Déclaration de politique générale. Les députés de Yewwi avaient introduit une Motion de censure contre l’ex-Premier ministre Amadou Ba, sur la base, curieusement, du même règlement intérieur argué de faux (…) Au regard de ce qui précède et en considération des arguties des députés de Yewwi askan wi, il reste évident que ceux-ci sont simplement en mission commandée pour éviter au Premier ministre Ousmane Sonko probablement le dépôt d’une motion de censure par la majorité parlementaire », a notamment indiqué M. Mbow lors d’un point de presse.

Qu’est-ce qui explique cette « hyper » présence du député de Thiès ? « Aujourd’hui, il faut le dire, même si la coalition Benno a perdu le pouvoir exécutif, il continue de contrôler le pouvoir législatif. Avec cette majorité, elle reste vivante et sa force sera déterminante surtout lors des batailles politiques au niveau du Parlement. Et ce pouvoir est, aujourd’hui, incarné, non pas par Macky Sall, mais par Abdou Mbow », répond notre interlocuteur, qui prédit, cependant, une dissolution « très prochainement » de cette Assemblée nationale.

L’Apr sur les pas du Pds ?

L’avenir de l’Apr après la chute de Macky Sall est un sujet complexe, marqué par des incertitudes et des défis importants. Les vagues de démissions de figures influentes au sein du parti et les frustrations internes reflètent des tensions internes et des divergences sur la direction future du parti, dont seul Macky Sall semble faire l’unanimité. Ces départs pourraient affaiblir à moins qu’un nouveau leadership capable de rassembler les factions émergentes ne prenne les rênes, en perspective des prochaines compétitions électorales. Les observateurs sont tous d’avis que l’absence de Macky Sall sur la scène politique pourrait modifier la dynamique électorale et affecter la base électorale du parti.

« L’avenir de cette formation politique dépendra en grande partie de la capacité du parti à s’adapter aux nouvelles réalités politiques, à identifier et à soutenir un leadership émergent capable de porter la vision et les valeurs du parti au-delà de la figure de Macky Sall », précise notre interlocuteur.

Quoi qu’il en soit, ses quelque rares sorties politiques sont faites par téléphone, ce qui présage une nouvelle forme de gestion de son parti à distance comme le fait pour le Parti démocratique sénégalais (Pds), Karim Meïssa Wade, depuis déjà quelques années déjà. Ainsi, en exil « forcé » depuis juin 2016, Wade-fils gère et manœuvre ses troupes en restant dans l’intimité des gratte-ciel qataris. Une posture qui a d’ailleurs valu une cascade de départs d’anciens barons libéraux, qui ont dénoncé une « gestion clanique » de la formation bleue. L’Apr risque-t-elle de subir le même sort ?

Quoi qu’il en soit, « ce sera difficile pour Macky Sall de manager ses troupes à distance tout en étant aux services du président français, Emmanuel Macron. Car avec sa fonction d’Envoyé spécial des 4P, il aura à porter de lourdes charges, sur le plan diplomatique, ce qui ne va pas lui faciliter la tâche », ajoute le politologue.

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