La tribune collective de Boris Diop, Felwine Sarr et Mbougar Sarr est aux antipodes de la rigueur scientifique. La méthode thèse-antithèse-synthèse est enseignée depuis l’école primaire pour donner aux élèves l’approche méthodologique équilibrée minimale. Dans le cas d’un problème, toutes les responsabilités de toutes les parties doivent être situées et chaque partie poussée à résoudre ses propres contradictions pour une solution optimale à court, moyen ou long terme. Cela est encore plus prégnant lorsqu’il s’agit de choses aussi complexes impliquant pouvoir, opposition, loi, ordre, population, développement.
Sur le champ des sciences sociales, penser détenir la vérité vous éloigne de l’esprit scientifique et vous plonge dans le dogmatisme. Penser que votre avis ou votre parti pris est la « vérité » est pure illusion et manque d’humilité scientifique.
Pour le trio, toute la tragique instabilité vécue récemment au Sénégal résulte d’une « dérive autoritaire » du Président Macky Sall et sa volonté supposée de faire un troisième mandat à la tête du pays. Lui seul est responsable de tout. L’enseignant Felwine Sarr n’aurait jamais accepté une telle légèreté de ses étudiants de première année.
Ces trois intellectuels font exprès d’ignorer les responsabilités du leader du PASTEF. Il est condamné pour « corruption de la jeunesse » parce qu’il s’est rendu de son plein gré dans un lieu de débauche et une employée y a porté plainte contre lui pour viols répétitifs et menaces de mort; il est condamné pour diffamation contre un ministre de la République qu’il a accusé d’avoir détourné 29 milliards FCFA sans jamais en apporter la preuve au tribunal; il appelle régulièrement à l’insurrection, use de terminologies violentes à l’extrême contre toutes les institutions et refuse de répondre à la Justice de son pays. Dans une démarche scientifique, si des faits objectifs sont sciemment mis de côté, quel qu’en soient les raisons, la « vérité » est cachée d’emblée.
Les trois n’ont fourni aucune preuve des « dérives autoritaires » du président de la République : condamnation pour excès de pouvoir par la Cour Suprême, décrets présidentiels illégaux, décisions arbitraires. Rien de tout cela.
Des concitoyens sont arrêtés pour divers délits et traduits en justice. C’est le travail des services de sécurité et de la Justice. Le trio se trompe en pensant que le président de la République est en même temps ministre de l’Intérieur, ministre de la Justice et procureur de la République; c’est insulter les fonctionnaires qui travaillent dur à ces positons et de ne les considérer que comme des marionnettes du Président. Ils se trompent.
Les trois étalent ainsi leur ignorance totale du fonctionnement sécuritaire de l’Etat du Sénégal. Cela se comprend car ils n’ont jamais été hommes d’Etat. Le trio étale son ignorance du style et des méthodes de travail du président de la République. Cela se comprend, ils n’ont jamais été ses collaborateurs.
S’il y a « dérives autoritaires » du président de la République, il faut les combattre devant la Cour suprême; si le président de la République n’a pas droit à un troisième mandat, que le Conseil constitutionnel le dise et nous apprendrons tous de cette jurisprudence. La maturité politique et populaire peut s’apprécier de deux manières : des batailles d’idées respectueuses, et le respect des décisions des institutions compétentes auxquelles on se réfère en cas de désaccord. A défaut, la violence du verbe et des actes balaie la loi et l’ordre, au détriment de l’Etat, la République, la nation et le pays. La haine mortifère s’installe.
Boris, Felwine et Mbougar n’ont aucun mot pour le ministre diffamé ou la jeune victime, traitée de « guenon atteinte d’AVC » par le leader du PASTEF, violence suprême. Cautionnent-ils la diffamation et l’avilissement de la femme?
Nous autres intellectuels avons l’obligation de transmettre autre chose à cette jeunesse prometteuse: écrire rigoureusement, ne pas parler de choses ni de personne que l’on ne maîtrise pas, parler avec objectivité, subtilité et sagesse, appeler au respect des institutions, de la loi, de l’ordre, et au progrès.
Nous n’avons que deux ennemis : la pauvreté et l’incivisme. Combattons-les ensemble pour le bien-être et le mieux-être continuels de tous les Sénégalais, « plus que frères ».
Mamadou Sy Tounkara est Conseiller spécial à la Présidence de la République du Sénégal