Au Sénégal, pays de la Téranga, les Législatives du 31.07.22 affichent une
particularité pour ne pas dire un caractère inédit en vomissant leur lot de
contestations, de rebondissements tous azimuts et de recours devant le Conseil
Constitutionnel.
Les acteurs politiques et à travers eux les Candidats à la Députation tout
comme l’ensemble des citoyens s’accrochent, aujourd’hui, au verdict des Sept
(7) « Sages » sur la validité ou non des listes des deux (2) grandes coalitions de
Partis politiques : Benno Baarewoul Yaakaar (mouvance présidentielle)
& Yewwe Askan Wi (opposition radicale).
Une situation inédite, saugrenue même voire d’une absurdité fortement ridicule
et, cependant, particulièrement explosive compte tenu du fait notoire et
indéniable que ces deux (2) formations ou coalitions politiques
polarisent l’échiquier politique sunugalien et comptent en leur sein les Partis et
les mouvements politiques les plus représentatifs du pays du Poète-Président
Feu Léopold Sédar SENGHOR.
Il s’avère donc impensable que ces 2 Coalitions soient recalées : la première
nommée risquerait l’invalidation sur tout le territoire due à un surplus de
parrainages et pour la seconde un rejet pur et simple pour le grief relatif au
non-respect de la parité en ce qui concerne le Département de Dakar.
La grande question est de savoir s’il faille, nécessairement voire
obligatoirement, trouver une solution équitable et légitime ou si, au contraire,
la Loi devrait s’appliquer de façon stricte et dans toute sa rigueur ; au risque
même de créer des troubles, une instabilité, une situation de chaos ?
Une interprétation étroite, à la lettre de la loi électorale invaliderait la liste des
deux coalitions les plus représentatives du pays et les exclurait, du coup, de
participation aux prochaines élections législatives (à l’échelle nationale pour BBY
et départementale – essentiellement pour la Région de Dakar – pour YAW.
Le paradoxe dans cette affaire extrêmement complexe et qui devra faire appel à
l’ingéniosité et à la clairvoyance de nos Sept (7) Sages repose dans le fait que
certains juristes verseraient, sans sourciller, dans le dilatoire pour ne pas dire
seraient dans le délire total en plaidant, je cite l’un d’entre eux et apparemment pas
des moindres :
« …… pour une jurisprudence qui ne peut et ne doit être ni fixe, ni figée, ni
définitive, le raisonnement à la base d’une décision de justice, quelle qu’elle soit,
peut et doit évoluer au gré des circonstances et de l’appréciation actualisée des
situations et autres conjonctures, en libre interprétation d’une science qui est
justement et essentiellement interprétative (le droit) »
Il est tout à fait possible de comprendre tel raisonnement ….. partisan.
Mais, cela soulève la question de savoir l’intérêt réel de disposer
d’une jurisprudence, c’est-à-dire d’un ensemble de décisions des cours & tribunaux
et devant constituer une source de droit, si les mêmes causes peuvent produire
des effets contraires, au gré des sensibilités et/ou des … rapports de force en
présence ?
Aujourd’hui, LE DROIT lui-même vient titiller ceux en charge de l’appliquer
mettant à l’épreuve, du coup, l’indépendance ou non du Pouvoir Judiciaire
exercé, en la circonstance, par le Conseil Constitutionnel.
Certes, telle indépendance est reconnue et garantie par la CONSTITUTION.
Également et surtout, il est stipulé dans la Charte nationale et en son Article 88
du Titre VIII relatif au POUVOIR JUDICIAIRE : « Le pouvoir judiciaire est
indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif ».
Cependant, de l’indépendance TOTALE ET SANS CONTRAINTE des juges,
il pourrait être permis d’en douter !
Il est, malheureusement, à déplorer que cette indépendance soit, parfois, du fait
d’un geste « maladroit » et jugé suspect, objet de suspicion.
Mais, au regard de ce qui précède, la sagesse élémentaire conduirait à
relativiser et à admettre la « condition humaine » comme légitime excuse de
toute « faiblesse ».
Toutefois, se lancer dans un débat sur une indépendance plus que salutaire des
juges et qu’on voudrait qu’elle soit aussi évidente que la vie et la mort serait –
de mon humble point de vue – vain et même stérile : psalmodier un truisme
serait vouloir débattre de l’existence du soleil.
Comme disait le sieur Amadou Lamine SALL dans une adresse à ses
compatriotes : « Le Droit plie, mais des juges invincibles luttent et ne rompent
pas ». Malheureusement, il faut également se rendre à cette autre évidence :
« Ceux qui devaient être la solution deviennent, parfois, le problème ». (Dixit
Mr SALL)
À la suite de cet intellectuel, j’ajouterai personnellement: « Il est une certitude
qu’il n’existe point d’ouvrage magnifique qui ne fondit tout entier au milieu de
la critique, si son auteur voulait en croire tous les censeurs prompts à lui ôter
le passage qui leur plairait le moins ».
Cette relative indépendance du Pouvoir Judiciaire longtemps décriée et
suspectée, se trouve au cœur de la polémique et devrait montrer son vrai
visage.
Bien entendu et relativement à la solution à apporter à cette cacophonie dans
l’espace politique, il nous parait une évidence que pour assoir leur intime
conviction – de surcroit dans le cadre d’un contentieux électoral – les Sept (7)
« Sages » ne pourraient aucunement ignorer ou tenter d’ »isoler » le contexte, ni
les circonstances et les enjeux et conséquences de la sentence attendue.
Certes, seule leur indépendance permet de ne pas douter de la sincérité d’une
telle conviction !
Toutefois, il parait évident que tout incident qui viendrait « perturber »
l’examen de la « légalité » ou non d’une candidature controversée et
massivement rejetée pourrait, psychologiquement, entrainer la conviction des
Sept (7) « sages » que le comportement, apparemment irrationnel, de la rue soit
voulu et organisé afin de semer le doute dans leur esprit.
N’en déplaise à la classe politique ; mais leur agitation contribuerait ainsi à
faire, largement, peser sur la conscience de ces juges cette crainte de troubles
insurrectionnels à laquelle pourrait dépendre leur intime conviction !
Je me garderai de porter une appréciation quelconque sur les principes qui
auront gouverné la sentence des juges chargés d’interpréter les dispositions de
la Constitution…
Mon propos est simplement de dire comment, à la lumière de ces principes et
des enjeux, il faudra, nécessairement, apprécier le sens de la mesure de ces
Sept (7) « Sages » ; seuls dépositaires d’une mission si lourde et si ingrate.
Au regard de la situation postélectorale, il est évident que ces derniers devront
– de mon humble point de vue – faire preuve de dépassement, de discernement
et d’une fine appréciation de leurs responsabilités devant l’histoire en ayant
cette lourde responsabilité de réussir le pari de circonscrire un « feu » qui
couve.
Selon la sensibilité de chacun, les incohérences d’un texte législatif ou tout
simplement ses imperfections peuvent ou non faire naitre le doute ; je respecte
ceux en qui ce doute nait. Mais, elles renforcent, au contraire, la « conviction »
d’un juge constitutionnel qui aboutit – du fait de son premier rôle de médiateur
– à cette conclusion : « Un « bon arrangement » vaut mieux qu’un « mauvais
procès » surtout lourd de conséquences monstrueuses ».
Aucun juge constitutionnel ne saurait rendre la justice et dire le droit, s’il ne
sait pas s’habituer au langage de la « rue », s’en accommoder même pour
pouvoir ensuite le décrypter, et aboutir à une sage solution.
Seul un recul suffisant par rapport au contentieux qui lui est soumis et une
réelle conscience de tous les rebondissements connexes peut lui permettre de
juger sereinement.
En son âme et conscience.
A toutes les incertitudes pour la paix sociale d’un procès jugé mauvais pour un
camp, s’ajouterait – au moins – une certitude contraire : la Paix à tout prix !
Enessam CHIMER, Juriste-Consultant
Ancien Conseiller Juridique de la Direction générale de la SCAT-URBAM SA
Président du Directoire de campagne du Président Mouhamed Ben DIOP et
Coordonnateur National du parti politique « Mouvement Pass-Pass »
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