Hamidou Thiaw, président du parti MPR : « Sonko, Khalifa Sall et Karim Wade doivent se présenter à la prochaine présidentielle”
Quelle analyse faites-vous de la situation politique actuelle du Sénégal surtout avec ce qui s’est passé le 16 dernier ?
L’analyse politique est que ce pays traverse une crise profonde : une pauvreté chronique, des jeunes désœuvrés sans une lueur d ‘espoir pour un avenir meilleur.
A cette situation explosive, on ajoute une situation politique instable ou la seule opposition en ce moment, représentée par Yewwi Askan Wi, risque de voir sa tête de file éliminée à la prochaine élection présidentielle, supprimant ainsi tout espoir d’un changement dans la vie de milliers de personnes.
“Soit nous allons à une élection présidentielle et une personne est choisie démocratiquement. Soit il y a des émeutes et l’armée prend le pouvoir”
En mars 2021, 14 personnes ont été tuées,l e 16 mars dernier on annonce deux autres morts.A ce rythme, se dirige-t-on vers le chaos ?
Non je ne pense pas. Espérons que la malédiction de l’or noir ne s’abatte pas sur notre cher pays. Il y a eu des morts, certes, mais il y a deux issues possibles : soit nous allons à une élection présidentielle et une personne est choisie démocratiquement.
Soit il y a des émeutes et l’armée prend le pouvoir.
Espérons que le premier scénario se déroule.
Mais est ce que manifester doit forcément signifier destruction de biens d’autrui?
Nous pouvons manifester sans détruire le bien des autres. Personnellement, je suis contre la destruction de biens publics.
Aujourd’hui, si nous détruisons les bus Dakar Dem Dikk, c’est la population sénégalaise qui perd parce que les politiciens ne prennent pas le bus. Évitons de détruire nos biens pour des raisons politiques, parce que demain ces mêmes partis politiques ou hommes politiques risquent de se retrouver à travers des coalitions.
Essayons d’inculquer à ces jeunes ce qu’on appelle le patriotisme national parce que l’Etat c’est nous d’abord. Les hommes passent mais les institutions demeurent.
Mais est ce que nous n’avons pas une jeunesse désespérée vu la vague de jeunes qui sont sortis le 16 mars dernier ?
Nous avons une jeunesse désespérée, désœuvrée, désemparée. Aujourd’hui, ils prennent des pirogues au péril de leur vie. Et c’est une situation désastreuse pour ces jeunes qui sont l’avenir de ce pays.
Cela me fait peur parce que sans jeunesse épanouie et compétente, il n’y a pas d’avenir pour ce pays. Nous devons nous assurer de leur épanouissement et de leur formation pour un Sénégal prospère demain.
“Cette tension que les partisans de Pastef ont créée est dûe au fait qu’ils pensent que le parti au pouvoir essaie d’éliminer leur leader”
Qu’est ce que votre parti MPR propose pour apaiser cette tension politique ?
Pour apaiser cette tension politique, nous proposons que toute personne avec une légitimité politique puisse se présenter à l’élection présidentielle notamment Karim Wade, Ousmane Sonko ou Khalifa Sall. Par légitimité, nous voulons dire les personnes qui ont un certain électorat.
Cette tension que les partisans de Pastef ont créée est dûe au fait qu’ils pensent que le parti au pouvoir essaie d’éliminer leur leader. Le syndrome Khalifa-Karim est très présent dans leur tête.
Une solution est de changer le code électoral et de permettre à tout citoyen de se présenter même s’il a un casier judiciaire à l’exception de crimes graves.
“Nous trouvons décevant qu’un président de la République, considéré comme une institution dans ce pays, puisse revenir sur sa parole”
Mais selon vous, est-ce que le débat sur la troisième candidature de l’actuel Président mérite tout ce tollé ?
Comme je l’ai sous-entendu précédemment, rien ne doit susciter l’instabilité dans ce pays reconnu comme modèle de stabilité et de paix en Afrique. Nous devons appliquer à Macky Sall le même sort subi par Wade quand la même situation s’est posée. Nous trouvons décevant qu’un président de la République, considéré comme une institution dans ce pays, puisse revenir sur sa parole.
Le 25 Février 2024, notre parti MPR demande à tous les Sénégalais de se munir de leur carte nationale d’identité nationale et d’aller voter en majorité pour l’opposition afin qu’il y ait une nouvelle alternance.
Mais parmi l’opposition, choisissons celui qui a la meilleure compétence, la meilleure expérience et le meilleur programme.
“Je pense que les candidats doivent pouvoir se réunir derrière une plateforme et pendant les élections vendre ce projet et non la personne ou le parti”
La dispersion de l’opposition n’est-elle pas bénéfique pour la coalition au pouvoir ?
Effectivement le meilleur des cas serait d’avoir deux ou trois candidats. Mais aujourd’hui avec les partis de cartable, les chasseurs de postes, nous voyons une multitude de candidats avec un ego démesuré pour pouvoir s’allier .
Je pense que les candidats doivent pouvoir se réunir derrière une plateforme et pendant les élections vendre ce projet et non la personne ou le parti.
Que vous inspire cette 14e législature ?
L’assemblée nationale, pour moi, est une catastrophe, une honte, une calamité qui montre une mauvaise image de notre cher pays.
165 citoyens portant l’espoir de 17 millions de Sénégalais après le 31 juillet 2022, aujourd’hui ont déçu cette population. On attendait une rupture, un changement. On espérait trouver des hommes intègres qui vont servir au lieu de se servir. Et aujourd’hui, l’hémicycle est devenu le terrain de jeu de disputes stériles, de violences envers les femmes et de discours éhontés de personnes sans scrupule ni valeur.
Considérée comme l’une des assemblées les plus chères de l’Afrique de l’ouest avec une dépense de 130 milliards en 5 ans, avec des députés fantômes qui reçoivent 1 million 300 mille FCFA, cette assemblée divisée a réussi l’exploit de négocier un salaire de plus de 2 millions sans trop faire de bruit. Quand les intérêts personnels sont réunis, ils peuvent travailler, illustration qu’ils sont la pour prendre leur part du gâteau .
Une honte que nous déplorons. Oui, le parti MPR condamne et a les larmes aux yeux à la vue de ce comportement indigne de nos députés.