En attendant le 12 septembre, jour de l’installation des députés de la 14e législature, la guerre des affiches et des slogans fait rage dans les rangs de l’intercoalition Yewwi-Wallu. Déjà, quatre candidatures sont agitées au sein même de Yewwi Askan Wi,contre une pour Wallu. Les affiches sont assez révélatrices. Elles en disent long sur les ambitions des uns et des autres au niveau l’intercoalition Yewwi-Wallu. A tel enseigne que beaucoup se demandent s’il leur sera possible d’avoir un seul et unique candidat, pour espérer barrer la route à Benno Bokk Yaakaar pour la présidence de l’Assemblée nationale.
Sans écarter totalement une telle éventualité, un des responsables de l’intercoalition confie à “EnQuête” que la probabilité reste très faible. “Cela m’étonnerait beaucoup, enchaine l’opposant. En fait, il ne faut pas oublier qu’il y a moins de deux ans qui nous sépare de la prochaine Présidentielle. Et comme chaque entité a des ambitions, il ne faut pas s’attendre à ce que les gens se fassent des cadeaux”.
Déjà, c’est la guerre des slogans et des affiches. Laquelle se joue jusque dans les différents groupes WhatsApp de l’intercoalition. Notre interlocuteur avoue et dédramatise : “C’est vrai que chacun est en train de vanter les mérites de son leader, dans la perspective de la Présidentielle de 2024. Mais jusque-là, ça se fait de manière civilisée, sur le ton même de l’ironie. Nous sommes quand même en politique et les gens sont libres d’avoir des ambitions. C’est même ce qui est normal.”
Dans cette guerre de positionnement, c’est Yewwi Askan Wi qui risque le plus d’en pâtir. Déjà, pas moins de quatre candidats ont été signalés au sein de ce bloc le plus représentatif de l’opposition. Troisième à la dernière Présidentielle de 2019, figure de proue de l’opposition, Ousmane Sonko a été l’un des premiers à officialiser sa candidature. À peine sorti des Législatives de 2022, il a invité ses partisans à faire “focus sur 2024”.
Dans la foulée, le président de Pastef avait annoncé une tournée nationale qu’il compte lancer à partir de ce mois de septembre. Aussi, prend-il un peu d’avance sur ses éventuels concurrents, de l’opposition comme du pouvoir.
Bien avant même les élections législatives, à la veille des Locales, l’autre grande figure de Yewwi Askan Wi, en l’occurrence Khalifa Ababacar Sall, avait lui aussi déclaré sa candidature, suite à une interpellation des journalistes de RFI et de France 24. Il disait sans ambages : “Inch’Allah, je serai candidat en 2024.” Sans se faire prier, l’ancien maire de Dakar expliquait le deal au sein de la coalition naissante : “Notre coalition Yewwi Askan Wi, qui est la coalition de l’espoir, a décidé d’aller ensemble pour les élections locales ; elle a décidé d’aller ensemble pour les élections législatives ; nous gouvernerons ensemble… Mais, pour la Présidentielle, c’est la pluralité qui est préconisée. C’est-à-dire tous les candidats se battront et au deuxième tour, on va se ranger autour du mieux placé.”
Depuis quelque temps, certains de ses partisans sortent leur affiche avec le hachage SN2024KAS. “Un président, lit-on dans une de leurs affiches, ce n’est pas un nom, c’est un comportement”. Mais à ce rythme, il risque de ne pas y avoir de deuxième tour pour aucun des candidats de Yewwi Askan Wi.
En effet, à côté de Khalifa Ababacar Sall et Ousmane Sonko, d’autres profils ont déjà annoncé leur candidature. Soit directement, soit par le biais de leurs partisans. Candidat recalé à la Présidentielle de 2019, le patron du Grand parti, Malick Gakou, n’a pas tardé à emboiter le pas à Ousmane Sonko.
Lors d’une rencontre organisée par les femmes de son parti, il s’est dit “prêt” pour la bataille de 2024. Dans la foulée, des partisans de Déthié Fall sont montés eux aussi au créneau pour vendre la candidature de leur leader. “Déthié Fall, 2024 Yaw la (Déthié Fall, 2024 c’est vous)”, scandent-ils.
Last but not least, il y a le Parti de l’unité et du rassemblement qui a participé à toutes les élections depuis au moins 2017. Il ne serait donc pas surprenant qu’eux aussi viennent allonger la liste déjà assez longue de prétendants.
Dislocation des forces de Yewwi Askan Wi ?
Cette dislocation des forces de Yewwi Askan Wi, si elle se concrétise, pourrait constituer un lourd handicap pour ladite coalition. Elle pourrait profiter, en revanche, à Wallu qui reste malgré tout un bloc plus ou moins homogène, avec un seul candidat déclaré pour la prochaine Présidentielle.
Sur les différentes affiches des partisans de Wallu, on peut lire : “Cap sur Karim 2024” ou bien “Karim, le candidat du peuple”. Une candidature qui est loin d’être une surprise, mais qui fait face à un obstacle juridique, à l’instar de celle de Khalifa Sall. En effet contrairement à Yewwi qui compte en son sein plusieurs fortes personnalités, au niveau de Wallu, il n’y a que le Parti démocratique sénégalais avec comme principal allié Mamadou Lamine Diallo.
C’est dans ce contexte de guerre de positionnement que se profile l’installation des députés de la 14e législature, avec comme point d’orgue le choix du futur président de l’Assemblée nationale. Qui va accepter de s’effacer pour mettre le “rival” sous le feu des projecteurs ?
Voilà toute la difficulté pour l’intercoalition d’avoir un seul candidat. C’est d’autant moins évident que celui qui sera choisi va diriger l’Assemblée pour toute la durée de la législature, s’il arrive à sortir victorieux de l’élection. Ce serait un butin de guerre non négligeable en direction de la prochaine Présidentielle.
En effet, la présidence de l’Assemblée nationale, c’est non seulement la deuxième personnalité de l’État, celui qui remplace le président de la République en cas d’empêchement, des compétences diplomatiques qui le mettent en selle sur la scène internationale, mais aussi, et surtout le contrôle effectif sur une manne financière de plus de 17 milliards F CFA…
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